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Le Blog de Voltaire

Moi, qui sers l’État toute la journée, j’ai besoin le soir d’une femme

Je jette les yeux sur tous les peuples de la terre, il n’y en a pas un seul, excepté le peuple catholique romain, chez qui le divorce et un nouveau mariage ne soient de droit naturel.

Quel renversement de l’ordre a donc fait chez les catholiques une vertu de souffrir l’adultère, et un devoir de manquer de femme quand on a été indignement outragé par la sienne ?
Pourquoi un lien pourri est-il indissoluble ? On me permet la séparation de corps et de biens, et on ne me permet pas le divorce. La loi peut m’ôter ma femme, et elle me laisse un nom qu’on appelle sacrement ! je ne jouis plus du mariage, et je suis marié. Quelle contradiction ! quel esclavage ! et sous quelles lois avons-nous reçu la naissance !
Quoi, un souverain peut abdiquer sa couronne, et sans la permission du pape il ne pourra abdiquer sa femme ! Est-il possible que des hommes, d’ailleurs éclairés, aient croupi si longtemps dans cette absurde servitude !
Que nos prêtres, que nos moines, renoncent aux femmes, j’y consens ; c’est un attentat contre la population, c’est un malheur pour eux ; mais ils méritent ce malheur qu’ils se sont fait eux-mêmes. Ils ont été les victimes des papes, qui ont voulu avoir en eux des esclaves, des soldats sans famille et sans patrie, vivant uniquement pour l’Eglise ; mais moi magistrat, qui sers l’État toute la journée, j’ai besoin le soir d’une femme ; et l’Église n’a pas le droit de me priver d’un bien que Dieu m’accorde. Les apôtres étaient mariés, Joseph était marié, et je veux l’être. Si moi Alsacien je dépends d’un prêtre qui demeure à Rome, si ce prêtre a la barbare puissance de me priver d’une femme, qu’il me fasse eunuque pour chanter des miserere dans sa chapelle.

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